Le 'Haméts, ça veut dire quoi en hébreu ?
Il convient à Péssa'h, de chasser le 'Haméts de sa maison, et, comme le disent les 'Hakhamim, de le bannir de son cœur. Je ne suis pas contre pour ce qui est de la maison, mais pourquoi devrais-je chasser le levain de mon cœur?
On me répond que le 'Haméts symbolise l'orgueil qui fait gonfler l'homme imbu de son importance, et qu'à Péssah, encore plus qu'à un autre moment de l'année, l'orgueil est un péché mortel. Or, rien dans la langue hébraïque n'évoque une quelconque similitude entre le levain et l'orgueil.
Par contre 'Haméts a la même racine que 'Hamouts qui signifie acide. La meilleure preuve, le vinaigre se dit 'Hométs. Donc, sur le strict plan étymologique, je devrais éliminer le levain de ma maison et l'acidité de mon cœur. Ce serait donc une histoire de PH. Je suis assez d'accord sur ce point, car rien n'est plus désagréable à Péssah ou à tout autre moment de l'année que d'avoir affaire à des personnes acides, aigries ou de se comporter soi même en "vin-aigre".
Les choses se compliquent quand on constate que oxydation en hébreu se dit 'Himtsoun, donc possède la même racine que 'Haméts.
Or, qu'est ce que l'oxydation, si ce n'est une réaction chimique dans laquelle un composé se combine avec un ou plusieurs atomes d'oxygène, comme par exemple l'oxydation du fer qui produit la rouille.
Et voici que miracle, oxygène en hébreu se dit 'Hamtsan. L'oxygène, ou l'air, pour faire simple, a de nombreuses propriétés positives; entre autres, il nous permet de vivre, car point d'oxygène, point de vie; la preuve, ces pauvres planètes qui ont tout pour être heureuses mais sont dépourvues d'oxygène. Autre utilité, en le combinant à deux atomes d'hydrogène, soit Méiman, il nous permet de boire de l'eau. Or, quand on laisse tremper du fer dans l'eau, il rouille ou s'oxyde, ce qui revient au même. L'oxygène n'a donc pas que des propriétés sympathiques.
L'oxygène permet aussi de gonfler des ballons et/ou de gonfler la poitrine à en devenir carrément gonflé ou gonflant, imbu.....d'orgueil et d’oxygène.
Moralité, les Hakhamim ont eu parfaitement raison d'interdire que le 'Haméts ne vienne envahir nos maisons ou nos cœurs à Péssa'h, pour des raisons halakhiques, chimiques et surtout étymologiques.
Mais, il convient d'ajouter, qu’avant l'orgueil, il y a l'acidité ou l'aigreur car la proximité entre 'Haméts et 'Hamouts est immédiate, alors que l'orgueil est une notion dérivée. Pourquoi les rabbins nous interdisent-ils l'orgueil et non l'aigreur ou l'acidité; ce serait logique, compte tenu de la proximité étymologique entre les mots 'Haméts et 'Hamouts ?
En hébreu, le verbe rater, qui se dit Léa'hmits comporte la même racine que 'Haméts. On rate une occasion, on brûle un plat, on passe à côté de quelque chose de fondamental. L'oxydation, la fermentation, l'acidité, une physionomie aigre (‘Hamouts panim) ne donne pas envie d'engager la conversation. Tout ça est un immense gâchis, un ratage : une personne aigrie rate sa vie et acidifie par la même occasion la vie de ceux qui l'entourent , tout comme l'orgueilleux qui met de la distance entre lui et les autres.
Péssa'h serait donc là pour nous rappeler qu'il est surtout interdit de créer des barrières entre nous, parce que nous avons tous été libérés d'Egypte, en même temps.
Mais il y a une autre notion à retenir: c'est la formidable richesse de l'hébreu, seule langue, qui avec trois lettres, est en mesure d'ouvrir des horizons infinis où la physique rejoint la philosophie et la psychologie.
Peut -être que ce billet d'humeur amènera certains de mes lecteurs à raconter l'année prochaine la Haggadah en hébreu, laissant au placard les traductions poussiéreuses, souvent inexactes, et qui nous font manquer (Léa'Hmits) la formidable richesse de notre langue.