Israël est-il devenu un tigre de papier ?
En ces temps troubles, mais depuis quand en Israël, le ciel politique est limpide, le mot qui revient le plus souvent est "négociation". Formelle, informelle, directe, indirecte, avouée, démentie, avec ou sans tiers habilités à négocier, on parlemente et négocie, sans répit et tous azimuts.
Enfin, on peut distinguer deux azimuts: nord-est, sud-ouest, comme dirait Brice de Nice; à savoir la Syrie et le Hamas
En général, une négociation suppose que les deux parties, d'une force sensiblement égale, parviennent à une solution acceptable par chacune d'entre elles. Les objectifs que se fixent les négociateurs israéliens sont, dans le cas de la Syrie, la paix en échange du Golan. Si le Golan est une entité géographique parfaitement définie, et que sa cession par Israël à la Syrie, est une perte sèche non remplaçable, la paix que réclame en échange Israël est un concept beaucoup plus flou. De quelle paix peut-il s'agir. Une paix comme celle qui va régner au Liban, où le Hezbollah s'étant rendu maitre du pays, n'a plus besoin d'y faire tonner le canon, ayant tout obtenu - y compris la tête de Fouad Siniora, qui va quitter son pays pour occuper je ne sais quelles fonctions à Washington - sans rien céder en échange.
Une paix qui n'engagerait, au mieux, que le signataire de l'accord, mais en aucun cas ses sbires, ses affidés ou ses successeurs. Supposons en effet qu'Assad appose son paraphe, qu'est ce qui l'empêche de continuer la lutte contre Israël par Hezbollah interposé, comme il a su si bien le faire au Liban. Ou, dans le cas où il serait renversé par un autre potentat – ces choses là sont fréquentes dans les sables mouvants qu'est le Moyen-Orient , qu'est ce qui empêcherait son successeur qui "n'aurait pas connu Joseph" ( voir début du livre de l'Exode) de déchirer le chiffon de papier, sans aucune valeur
Une paix est signée par deux parties de force à peu près égale, or la Syrie est un moustique sur le plan militaire par rapport à Israël. Un éléphant ne signe jamais de paix avec un moustique, au pire il lui donne un coup de trompe, ou le noie dans un marécage.
Le plus exaspérant est l’indignation de Bush et d'Ahmadinejad qui se lamentent parce que leurs poulains joueraient cavalier seul, et ne les auraient pas avertis de leurs "pourparlers de paix", par Turquie interposée.
M'est avis que ces indignations sont parfaitement feintes. Je ne crois pas un seul instant qu'Assad prenne une quelconque initiative d'importance, sans en informer son bailleur de fonds et patron. Je crois même que dans cette partie de poker menteur c'est Ahmadinejad qui a le plus gros tapis et qu'à la fin de la partie, il partagera, à parts inégales, ses gains avec son fidèle Assad, qu'il ne cesse de téléguider et de financer, y compris dans le cas du Liban. Quant à Bush, malgré sa vue courte, je n’imagine pas non plus, qu'il n'ait pas été mis dans le secret de dieux....déchus.
Pour ce qui est du Hamas, une négociation qui aboutirait à un cessez le feu provisoire, est un leurre et qui plus est une faute. Israël, au mieux peut espérer recevoir un peu moins de Grad sur le Haut Néguev, pendant quelques semaines, mais est assuré de voir les nouvelles bombinettes, à plus long rayon d'action et plus destructrices, s'abattre sur Ashdod, Kyriat Gat et Beer-Shéva. Une trêve permettra au Hamas de tirer profit de l'accalmie, pour renforcer son arsenal.
Enfin, il faut bien intégrer le fait que toute négociation renforce la sensation des Arabes d'être en position de force. Il n'y a que les faibles qui demandent à négocier, les autres "donnent la punition".
Il n'y a rien, strictement rien, à attendre du Hamas. Carter, Kouchner et autres autorités helvétiques, poissons pilotes, téléguidés par je ne sais quelles chimères, ont beau discuter avec ces assassins, il convient de considérer leurs initiatives comme de simples gesticulations.
Il me semble au contraire que le moment de prises de décisions énergiques est largement venu, en espérant qu'il ne soit pas déjà dépassé. Pendant qu'Olmert négocie - ou prétend négocier - avec la Syrie, celle-ci a étendu de fait son territoire opérationnel vers le Liban. Israël est ceinturé sur sa frontière nord-est, nord. Le Hamas s'arme de missiles à longue portée et coordonne plus jamais que sa stratégie avec La Syrie et l'Iran. Ahmadinejad se félicite chaque jour de la mollesse de l'Occident à son égard, quand ce n'est pas des promesses de dialogue que font miroiter des responsables ou de futurs responsables politiques, tels qu'Obama. Et pendant ce temps là, Israël négocie... Avec qui et pourquoi ?
Je sais bien que c'est avec ses ennemis qu'il faut négocier, à condition que le mot "négociation" ait un sens pour eux, et ne soit pas assimilé à de la faiblesse ou de la lâcheté ; ce qui est précisément le cas quand Israël fait reculer une base militaire située trop près de Gaza. Comment pensez-vous que le Hamas interprète ce retrait de soldats de Tsahal, si ce n'est par la peur qu'il inspire.
Israël est perçu aujourd'hui par ses ennemis comme un tigre de papier qui rugit mais ne sait plus mordre. Il est largement temps de prouver que cette perception ne correspond pas à la réalité, et commencer là où cela s'avère prioritaire, à savoir à Gaza, gelant en parallèle les salamalecs avec la Syrie, qui n'ont aucun caractère d'urgence et ne mèneront de toute façon à rien.
Se débarrasser du Hamas, et dans les délais les plus courts, est une priorité de tout premier ordre, et la tache essentielle à laquelle devrait se consacrer Israël. Le succès d'une opération réussie dans la bande de Gaza, ferait de plus réfléchir les autres Etats de la région, et réduirait du même coup leurs prétentions...en cas de véritables négociations.